mardi 31 mai 2016

CANTALIA

L’art de Passer le Flambeau


En 1955, l’industriel Michele D’Ambrosio épouse la cause du soccer et accepte de devenir principal bailleur de fonds d’une nouvelle équipe italienne à Montréal. Sous la bannière de la Canadian-Italian Amateur Athletic Association, D’Ambrosio, en tant que président, sera assisté par Alfredo Garbarino, Joe Vincelli, M.Tucci, Windy Morielli, S. Silvestre et Aldo Cecchi au rôle de directeur technique. L’expérience désastreuse du club Hakoah dans l’Interprovinciale aurait pu en décourager plusieurs, mais le succès à Toronto parlait plus fort.
La CIAAA veut donner l’exemple à suivre pour faire du soccer un sport majeur. Bien sûr, il fallait investir dans un stade et dans de bons joueurs, mais D’Ambrosio va plus loin. Il savait que si on voulait des assistances de 10 000 à 20 000 personnes, il fallait abso-lument amener les Canadiens français dans les stades. Une tâche gigantesque, car elle coïncide avec le début de l’expression formelle du nationalisme québécois, même dans le sport. Comme en témoigne l’émeute du mois de mars au Forum de Montréal, déclenchée, souvenons-nous, par la présence du président de la Ligue nationale de hockey, Clarence Campbell. Celui-ci s’était entêté à se présenter au match, sachant très bien qu’il serait malvenu après avoir suspendu Maurice Richard, injustement selon les partisans. Pour la grande majorité des Canadiens français, le soccer restait un sport d’immigrants anglophones et allophones.
D’Ambrosio avait l’habitude de relever de grands défis. Montréalais de naissance, en 1926, à l’âge de 19 ans, il occupait déjà le poste de contremaître dans une compagnie hydraulique mécanique. Il fonda sa propre compagnie et, entre 1949 et 1960, la Industrial Plumbing & Heating occupait une place importante sur le marché nord-américain. Dans les années 30, il avait subventionné les premières équipes semi-professionnelles italiennes de hockey et de base-ball.
Par ailleurs, les Canadiens français ont joué aussi un rôle dans l’histoire du soccer montréalais. Peu savent quel était ce rôle, parce que peu d’historiens ont osé s’aventurer dans la recherche historique d’un sport étiqueté comme celui des immigrants. Il suffit de penser à l’exemple des célèbres frères Castonguay. L’aîné, Roland Alphonse Joseph Castonguay, joua son soccer juvénile pour le club Westmount. Cet homme de petite taille, à peine 5 pieds 2 pouces, est par contre très costaud. Il est un redoutable ailier gauche.
En 1932, il devient joueur senior avec la prestigieuse équipe du Canadian Pacific Railway (CPR), équipe qui aligne entre autres Geordie Jenkins, qui connaîtra un grand succès avec le Glasgow Rangers. On le surnomme « Dempsey », car il pouvait décrocher un puissant tir, autant du pied gauche que du droit. En 1934, avec le club Verdun Park qui aligne Jim Lone, Harry Payne jr., et les frères Fitzpatrick, « Dempsey » hérite tout naturellement du rôle d’ailier. Avec le Verdun Park, il se rend en finale canadienne et gagne la Challenge Cup contre le Reds de Prince Albert. L’année suivante, avec les frères Fitzpatrick, « Dempsey » se joint au club Aldred. Encore une fois, il gagnera la Challenge Cup, sans doute le premier Canadien français à réussir l’exploit.
En 1936, Paul-Émile Castonguay, joueur d’avant-centre, se joint à son frère « Dempsey » et ils feront la pluie et le beau temps avec le Carsteel.


Paul-Émile se fera remarquer en 1939 en marquant près de 40 buts. Il sera le joueur clé qui amènera le Carsteel en finale de la Challenge Cup, mais sans toutefois l’emporter à Winnipeg contre le Radials de Vancouver.
Marcel Castonguay, quant à lui, après un bref séjour avec le club Victoria Hospital, se joint aussi au club Carsteel.
Avant la deuxième guerre mondiale, au moins un des Castonguay faisait toujours partie de l’équipe étoile de Montréal. « Dempsey » a même joué contre les étoiles écossaises au stade McGill au mois de juin 1939, à la veille de la visite royale et également contre le Charlton Athletic au stade de base-ball. En 1948, Marcel sera de la sélection montréalaise qui affrontera le Liverpool devant 12 000 spectateurs au stade de base-ball. Montréal perd la partie 4-2, mais Marcel sera l’auteur d’un des buts. 
D’Ambrosio est un visionnaire qui peut se permettre de rêver, il en a les moyens. C’est de cela que le soccer montréalais avait besoin. La nouvelle organisation italienne allait prendre les choses en main et l’un des premiers gestes qu’elle pose est de débarrasser le club Montreal Italia de son nom, considéré trop nationaliste. Le Montreal Italia sera remplacée par le politiquement correct « Can-talia (Canada-Italia), » qui lorsque contracté deviendra, Cantalia. L’opération s’est faite en « coulisse » et quand Pessa se réveilla, il ne put que constater que la majorité des joueurs du club Montreal Italia l’avaient déserté.

Aucun commentaire: